A l’heure de devoir émettre un jugement sur la capitale bavaroise, me voilà embarrassé. Sa richesse architecturale, artistique et « naturelle » est indéniable. Pourtant je ne peux cacher une certaine déception. Peut-être l’avais-je imaginée trop belle ; peut-être le temps grisâtre et froid avaient-ils pénétré au fond de mon âme ; ou peut-être encore, sentant la nécessité de « faire »  nos kilomètres pour nous rapprocher de Moscou, n’étais-je pas assez détendu pour apprécier la ville comme elle le méritait.

Après un très bon « petit » déjeuner – en Allemagne, ils savent faire ! –, nous quittâmes notre hôtel et le cosmopolite quartier de la gare pour entrer dans le centre historique. Nous remontâmes la rue piétonne Neuhauser Strasse en nous arrêtant dans les églises qui jalonnaient le parcours – Bürgersaalkirche, l’église Saint-Michel puis l’église des Femmes. Nous arrivâmes vite au cœur de la ville, son célèbre hôtel de ville, devant lequel je passai un bon moment en attendant Katya, attirée par les belles boutiques de la ville.

Nous nous éloignâmes un petit peu de la place Marie pour faire la difficile ascension de la tour de l’église Saint-Pierre, depuis laquelle nous pûmes contempler toute la ville.

A peine redescendus, nous mîmes cap au nord pour nous rendre au jardin Anglais. Sur le chemin, nous découvrîmes la Résidence de Munich, le palais des ducs ou rois de Bavière, et son élégant jardin le Hofgarten.

Pressés par le temps, nous nous contentâmes de la partie sud du gigantesque parc, où nous eûmes la surprise de voir des surfeurs en pleine « glisse » sur l’Eisbach – la « rivière de glace » – une impétueuse rivière artificielle traversant le jardin.

Nous quittâmes le parc avec regrets mais il fallait penser désormais à revenir. Nous rejoignîmes la rue Ludwig par la place Geschwister-Scholl, bordée par l’université de la ville. Nous descendîmes la longue rue, où les ambassades se succédaient, faisant une nouvelle étape dans l’église Ludwig.

Mais si j’avais eu l’envie de me rendre à Munich, ce n’était ni pour la bière, ni pour les églises ou les parcs. C’était pour la Pinacothèque. Hélas, la réceptionniste de l’hôtel nous avait appris avec regret qu’elle était fermée le lundi, notre seul jour sur place. Extrêmement déçu, je décidai néanmoins de nous offrir un dernier détour pour les « voir » de l’extérieur. Etait-ce par sadisme ou par scepticisme ? Toujours est-il qu’à notre grand étonnement la « Nouvelle Pinacothèque » – il y a trois pinacothèques, la « vieille », la « nouvelle » et celle « d’art moderne » – était ouverte. Celle-ci était consacrée au XIXe siècle, mon siècle chéri, et, même si j’avais d’abord pensé à visiter celle d’art moderne, il était trop tentant de profiter de cette « chance ». Nous cédâmes à la tentation et abandonnâmes tout espoir de tenir nos « délais » du jour pour nous offrir une merveilleuse visite, en « tête à tête » avec les grands maîtres et les chefs d’œuvres d’un siècle décisif : Goya, David, Gainsborough, Reynolds, Constable, Friedrich, Delacroix, Turner, Liebermann, Pissaro, Seurat, Signac, Sisley, Renoir, Manet, Monet, Cézanne, Gauguin, Van Gogh, Klimt, Toulouse-Lautrec, Rodin, Daumier, Maillol et surtout Hans von Marées, l’un des chefs de file de l’idéalisme allemand, dont les œuvres me ravirent.

Nous ressortîmes sur un petit nuage. Nous longeâmes les deux autres pinacothèques, décidément fermées, avant de retrouver le quartier de la gare et – à notre soulagement – notre voiture. Surtout ce qu’elle contenait, car nous l’avions abandonnée dans un parking souterrain non surveillé.

Nous quittâmes enfin la ville, prenant la direction de l’Est et de la République tchèque, sous une magnifique lumière de fin d’après-midi.